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Recel criminel : pas de période de sûreté

Pénal - Procédure pénale
09/03/2020
La période de sûreté n’est pas une peine mais un mode d’exécution de celle-ci. Partant de là, l’interprétation stricte de la loi pénale exclut toute période de sûreté du recel criminel.  
Un homme est condamné le 4 novembre 2018 à une peine de dix ans de réclusion criminelle pour les crimes de recel de vol commis avec usage ou menace d’une arme en bande organisée et recel de vol en bande organisée. Détenu depuis le 8 avril 2016, et en tenant compte des périodes de détention provisoire effectuées, sa date de libération est fixée au 11 novembre 2022.
 
L’intéressé a fait une demande de permission de sortir du 8 au 10 avril 2019 qui a été rejetée. Il interjette appel de la décision.
 
La cour d’appel infirme la décision du juge de l’application des peines mais estime qu’aucune période de sûreté n’est applicable et déclare la demande sans objet, la date de sortie étant dépassée. Pour elle, le rejet du juge du premier degré est motivé par l’existence d’une période de sûreté de droit, en cours jusqu’au 21 février 2021 et le détenu a été condamné à la peine de dix ans sans qu’aucune période de sûreté n’ait été prononcée par la cour d’assises.
 
Ainsi selon le président de la chambre de l’application des peines, « les crimes dont le condamné a été reconnu coupable ne font pas partie de ceux énumérés par la loi, pour lesquels une période de sûreté est encourue de plein droit, une telle disposition ne figurant pas aux articles 321-1 et suivants du Code pénal réprimant le recel ».
 
Aussi, il importerait peu que lorsque l’infraction dont provient le bien recelé est punie d’une peine privative de liberté d’une durée supérieur à celle de l’emprisonnement encouru au regard des articles 321-1 ou 321-2, « le receleur est puni des peines attachées à l’infraction dont il a connaissance et, si cette infraction est accompagnée de circonstances aggravantes, des peines attachées aux seules circonstances dont il a eu connaissance, ou que le recel soit assimilé, au regard de la récidive, à l’infraction dont provient le bien recelé, la loi pénale étant d’interprétation stricte et la période de sûreté étant, non pas une peine, mais une modalité d’exécution de celle-ci ».
 
Le détenu forme un pourvoi en cassation. Il critique l’ordonnance jugeant qu’une période de sûreté obligatoire n’était pas applicable à sa situation.
 
Pour autant, la Cour de cassation rejette son pourvoi. Elle rappelle que :
  • selon l’article 123-23 du Code pénal, la période de sûreté de plein droit s’applique en cas de condamnation à une peine privative de liberté, non assortie du sursis, dont la durée est égale ou supérieure à dix ans, prononcée pour les infractions listées par la loi ;
  • et l’article 321-4 du même Code prévoit que « lorsque l’infraction dont provient le bien recelé est punie d’une peine privative de liberté d’une durée supérieure à celle de l’emprisonnement encouru en application des articles 321-1 ou 321-2, le receleur est puni des peines attachées à l’infraction dont il a eu connaissance et, si cette infraction est accompagnée de circonstances aggravantes, des peines attachées aux seules circonstances dont il a eu connaissance ».
 
Ainsi, pour les Hauts magistrats, la période de sûreté est un mode d’exécution de la peine, et non une peine (Cons. Constit., 26 oct. 2018, n° 2018-742 QPC). « Dès lors, l’interprétation stricte de la loi pénale exclut toute période de sûreté du recel criminel ».
Source : Actualités du droit