Retour aux articles

Carences du légataire universel : la désignation d’un mandataire successoral validée !

Civil - Personnes et famille/patrimoine
22/10/2019
La Cour de cassation s'est prononcée sur la validité de la désignation judiciaire d'un mandataire successoral pour pallier la carence des héritiers malgré la présence d'un légataire universel. 
Une personne est décédée laissant pour lui succéder ses cinq enfants. Le dernier est institué légataire universel. L’entente entre les héritiers étant difficile, un syndicat de copropriétaires d’un immeuble dépendant de la succession demande qu’un mandataire successoral unique soit désigné.

L’article 813-1 du Code civil prévoit en effet que le juge peut désigner un mandataire successoral pour administrer provisoirement une succession notamment en raison de l'inertie, de la carence, de la faute d'un ou de plusieurs héritiers ou d’une mésentente entre eux.

Il est fait droit à la demande de désignation en tenant compte du fait que le légataire universel, administrateur de la succession, n’a pas publié son titre et refuse de payer les charges de copropriété. L’arrêt relève en outre un conflit entre le légataire universel et trois héritiers réservataires.

Deux des héritiers contestent cette désignation en arguant que l’inertie, la carence ou la faute d’héritiers ne peuvent justifier la désignation d’un mandataire successoral que si celles-ci ont des conséquences non pas sur la gestion mais sur l’administration de la succession. En présence d’un légataire universel, c’est-à-dire un seul propriétaire des biens, il n’y aurait aucune succession à administrer.

La Cour de cassation a ainsi dû s’interroger sur la nécessité de désigner un mandataire successoral pour palier l’inertie des héritiers malgré la présence d’un légataire universel.

La Chambre civile commence par justifier l’application de l’article 813-1 du Code civil. En effet, « l’article 813-1 du Code civil n’est pas réservé aux successions indivises, mais a vocation à s’appliquer à toute succession et que, si le légataire universel n’est pas en indivision avec les autres héritiers réservataires, la mauvaise gestion et la diminution du patrimoine successoral compromettent leur intérêt commun ».

Et, pour relever les carences en l’espèce, les magistrats relèvent que depuis le décès du de cujus « une grande partie des charges de copropriété est impayée, que (le légataire universel) les a contestées sans toutefois engager d’action pour faire trancher ce litige, qu’aucune attestation immobilière portant sur la propriété des lots n’a été publiée depuis huit années, ce qui entrave les diligences que le syndicat des copropriétaires peut entreprendre pour recouvrer la dette et qu’il n’est pas démenti que l’immeuble se dégrade, en l’absence d’entretien et de travaux ». En outre, « la situation conflictuelle entre le légataire universel et les autres héritiers réservataires retarde également le règlement de la succession ».

Par conséquent, ces faits « caractérisant l’inertie et la carence du légataire universel dans l’administration de la succession et la mésentente entre héritiers, la cour d’appel a pu déduire qu’il convenait de désigner un mandataire successoral ».

Le pourvoi est donc rejeté. L'occasion pour les magistrats de rappeler que l’article 813-1 du Code civil n’est pas réservé aux indivisions. La présence d’un légataire universel n’est pas un obstacle à son application.  
Source : Actualités du droit