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Assignation à résidence et non-présentation au commissariat : obstruction à la mesure d’éloignement ?

Public - Droit public général
27/09/2018
Dans deux arrêts rendus le 19 septembre 2018, la première chambre civile de la Cour de cassation a apporté des précisions quant aux actions pouvant caractériser une obstruction volontaire aux mesures d’éloignement.
Les deux affaires portaient sur l’application des dispositions du II de l’article L. 561-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2018-187 du 20 mars 2018. Cet article prévoit la possibilité pour l’autorité administrative, en cas d’obstruction volontaire de l'étranger assigné à résidence, de demander au juge des libertés et de la détention (JLD) de l'autoriser à requérir des services de police ou de gendarmerie une visite domiciliaire. Il revient alors au juge saisi de s’assurer de l’existence, dûment constatée par l'autorité administrative, d’une telle obstruction volontaire, qui résulte notamment de « l'absence de réponse de l'étranger à sa demande de présentation » pour les nécessités de l’exécution de la décision d’éloignement.

La Cour de cassation énonce dans la première décision que le non-respect de l’obligation de se présenter périodiquement au commissariat caractérise une obstruction volontaire à la mesure d’éloignement. Elle précise dans la seconde que ce non-respect, en dehors de la période d’assignation à résidence, ne constitue au contraire pas une obstruction volontaire.

La non-présentation au commissariat constitue une obstruction volontaire

Dans le premier cas, un ressortissant étranger avait fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) avec assignation à résidence et obligation de se présenter trois fois par semaine au commissariat. L’intéressé n’ayant jamais respecté cette obligation, le préfet a demandé au juge des libertés et de la détention de l'autoriser à requérir les services de police afin qu'ils visitent son domicile et lui notifient une décision de placement en rétention.

La cour d’appel lui avait refusé cette autorisation, en affirmant que le non-respect de l’obligation de se présenter au commissariat par l’étranger assigné à résidence ne caractérise pas une obstruction volontaire à la mesure d'éloignement.

La Cour de cassation affirme au contraire que cette non-présentation au commissariat constitue effectivement une obstruction volontaire à la mesure d’éloignement.

Pas d’obstruction volontaire en dehors de la période d’assignation à résidence

Dans le second cas, un étranger en situation irrégulière en France faisait également l’objet d’une OQTF et d’une assignation à résidence avec obligation de se présenter à un service de police tous les cinq jours ouvrables, pour une durée de quarante-cinq jours. Le préfet a demandé au JLD de l'autoriser à requérir les services de police ou de gendarmerie afin qu'ils visitent le domicile de l’étranger, au motif que celui-ci n’avait pas respecté les prescriptions liées à son assignation à résidence.

Le juge accueille cette demande et affirme que le ressortissant étranger « a opposé une obstruction volontaire à son éloignement, dans la mesure où il n'a entrepris aucune démarche utile pour sa mise en œuvre ».

Toutefois, le ressortissant étranger n’était plus assigné à résidence au moment de la requête du préfet. La Cour de cassation retient évidemment que dans de telles circonstances, l’absence de présentation au commissariat ne peut pas caractériser une obstruction volontaire de l’étranger à la mesure d’éloignement.
Source : Actualités du droit