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Absence de référence à des cotes du dossier dans l’ordonnance du juge des libertés : pas de nullité

Pénal - Procédure pénale
30/08/2018
Dans un arrêt rendu le 8 août 2018, la chambre criminelle de la Cour de cassation affirme que l’absence de mention à des cotes du dossier d’information par le juge des libertés et de la détention dans son ordonnance rejetant une demande de mise en liberté n’entraîne pas la nullité de cette ordonnance.
En l'espèce, le requérant avait été mis en examen et placé en détention provisoire sous mandat de dépôt criminel. Le juge des libertés et de la détention (JLD) a rejeté sa demande de mise en liberté, décision contre laquelle le requérant a interjeté appel, invoquant une exception de nullité tirée de l’absence de référence, dans les motifs de la décision, à des pièces cotées au dossier. La cour d’appel a rejeté sa demande de mise en liberté ainsi que l’exception de nullité invoquée.

Le requérant forme un pourvoi en cassation et allègue encore devant la cour ce même motif de l’absence de référence aux cotes du dossier, l’ayant privé selon lui d’un exercice utile et contradictoire de ses droits. Dans de telles circonstances, il est demandé à la Cour de cassation de déterminer si le moyen opposé peut valablement entrainer la nullité du l’ordonnance du JLD.

Pas de nullité

La Cour de cassation retient, d’une part, qu’« aucun texte n’impose au juge des libertés et de la détention de corroborer ses motifs par des références à des cotes du dossier d’information ». D’autre part, en l’absence de démonstration par l’avocat de toute atteinte portée aux intérêts du demandeur et aux droits de la défense, et dans la mesure où il disposait d’un droit d’accès permanent au dossier et avait pu se faire délivrer une copie des pièces de la procédure, il « était en mesure d’exercer ses droits et d’apprécier la portée des motifs retenus par le juge ».

La cour en déduit que la chambre de l’instruction a légalement justifié sa décision, et rejette ainsi les conclusions du requérant.

Le fond prime sur la forme

Cet arrêt peut être rapproché de plusieurs autres décisions de la chambre criminelle, dans lesquelles la cour a déjà exprimé clairement que le fond reste plus important que la forme, tant que le respect des intérêts de l’intéressé sont garantis.

C’est le cas, par exemple, de l’une des jurisprudences récentes de la cour en matière d’information du prévenu lors de l’audience (Cass. crim., 27 juin 2018, n° 17-85.959, F-P+B ; sur ce thème, lire l’actualité du 05/07/18, « Obligation d’information des droits du prévenu lors d’une audience avec plusieurs prévenus »).

De même, la cour avait jugé en 2004 que le défaut de signature de la première page du procès-verbal de débat contradictoire de prolongation de la détention provisoire n'entraînait pas la nullité du titre de détention, dès lors que les signatures requises figuraient à la fin de ce procès-verbal. Elle affirmait alors que l’irrégularité alléguée entrait dans les prévisions de l’article 802 du Code de procédure pénale, selon lequel, dans les cas où la violation des formes prescrites par la loi devrait entraîner une nullité, celle-ci n’est prononcée par les juridictions que lorsque l’irrégularité « a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne » (Cass. crim., 22 juin 2004, n° 04-82.105). Ce même principe est appliqué en l’espèce : la cour adopte une position analogue en faisant primer, en l’absence de toute atteinte portée aux intérêt de l’intéressé, le fond sur la forme.
Source : Actualités du droit