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Prolongations d'assignation à résidence : confirmation de la suspension pour défaut d'élément nouveau

Public - Droit public général
22/06/2017
Faute pour le ministre de l'Intérieur de produire des éléments nouveaux ou complémentaires postérieurs à la date de la dernière prolongation, de nature à établir la persistance de la menace, les assignations à résidence doivent être suspendues. Telle est la solution énoncée par le Conseil d'État dans deux ordonnances du 19 juin 2017.
Dans cette affaire, un couple proche de la mouvance islamiste avait été assigné à résidence le 23 décembre 2015. Ces assignations ont été renouvelées lors de chaque prolongation de l'état d'urgence. Par des arrêtés, le 20 décembre 2016, elles ont été prolongées pour trois mois au-delà de la période d'un an qui constitue en principe la durée maximale. Le 20 mars 2017, le ministre de l'Intérieur a à nouveau prolongé ces assignations pour trois mois. Le couple a demandé, le 9 juin 2017, au juge des référés du tribunal administratif de Lille de suspendre la dernière prolongation (en date du 20 mars 2017) de leurs assignations à résidence. Par des ordonnances du 16 juin 2017, le juge des référés a fait droit à leur demande. Le ministre de l'Intérieur a fait appel de ces ordonnances devant le juge des référés du Conseil d'État. Pour les raisons précitées, le juge des référés du Conseil d'État rejette les appels du ministre de l'Intérieur contre les ordonnances qui ont suspendu les prolongations des assignations. Les intéressés ne sont donc plus assignés à résidence.

Pour mémoire, l'article 6 de la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence permet d'assigner des personnes à résidence lorsqu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'elles constituent des menaces pour la sécurité et l'ordre publics. La loi du 19 décembre 2016 a prévu que la durée d'une mesure d'assignation à résidence ne peut en principe excéder douze mois, consécutifs ou non. Au-delà de cette durée, une telle mesure ne peut être renouvelée que par périodes de trois mois. Il résulte de la décision n° 2017-624 QPC du Conseil constitutionnel du 16 mars 2017 que ces prolongations au-delà d'un an sont soumises au respect de trois conditions :
– le comportement de la personne en cause doit constituer une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics ;
– l'autorité administrative doit produire des éléments nouveaux ou complémentaires ;
– doivent être prises en compte dans l'examen de la situation de l'intéressé la durée totale de son placement sous assignation à résidence, les conditions de celle-ci et les obligations complémentaires dont cette mesure a été assortie.

Par June Perot
Source : Actualités du droit