Retour aux articles

Culpabilité d'un accusé ayant gardé le silence et contenu de la citation : pas de violation de la CESDH par la Belgique

Pénal - Procédure pénale
02/06/2017
La Convention européenne n'interdit pas de prendre en compte le silence d'un accusé pour conclure à sa culpabilité, sauf si sa condamnation se fonde exclusivement ou essentiellement sur son silence. Aussi, le fait que la citation devant le tribunal se limitait à décrire les opérations servant à établir l'existence de ce délit suffit pour permettre à l'intéressé d'exercer ses droits de la défense.
Tels sont les principaux enseignements d'un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) rendu le 1er juin 2017. Dans cette affaire, en mars 2003, M. Z. ouvrit un compte dans une banque en Belgique et y déposa, en l'espace de deux mois, la somme de 75 000 euros, en cinq versements. La banque déclara les versements auprès de la cellule de traitement des informations et une procédure pénale fut ouverte à l'encontre de M. Z. du chef de blanchiment de capitaux. Lors de son interrogatoire, M. Z. fut interrogé sur l'origine de l'argent versé sur le compte bancaire. Il expliqua qu'il travaillait au noir et qu'il avait gagné cet argent en quatre ans, sans donner le nom de ses employeurs. En juin 2005, le tribunal correctionnel d'Anvers condamna M. Z. à 10 mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 5 000 euros. Les 75 000 euros furent également confisqués au motif qu'ils constituaient un avantage patrimonial tiré directement de l'infraction. Pour motiver son jugement, le tribunal prit notamment en compte le fait que M. Z. n'avait pas donné d'explication sur l'origine de l'argent, qu'il était connu aux Pays-Bas pour des infractions liées à la drogue et qu'il n'y disposait pas de revenus. Ce jugement fut confirmé en appel et le pourvoi en cassation de M. Z. fut rejeté en novembre 2006.

Il saisit alors la CEDH et, invoquant l'article 6 § 1, 2 et 3
, argua que sa présomption d'innocence, son droit de se taire ainsi que ses droits de la défense avaient été violés compte tenu du fait que les juridictions nationales n'avaient pas caractérisé l'infraction à la base du blanchiment et n'avaient pas établi l'origine illégale de l'argent soi-disant blanchi. M. Z. a également soutenu que les juges du fond avaient renversé la charge de la preuve puisqu'il lui revenait de rapporter la preuve de l'origine de l'argent et donc de son innocence. Aussi, M. Z. a-t-il soutenu que le fait que l'infraction de base n'ait pas été mentionnée ou décrite dans la citation devant le tribunal correctionnel l'avait empêché d'être informé de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui, et ce d'autant plus que cette information n'avait pas non plus été fournie à un stade ultérieur de la procédure.

Énonçant les principes susvisés, la Cour ne retient aucune violation des textes précités.

Par Aziber Seïd Algadi
Source : Actualités du droit