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Résiliation anticipée du contrat par l'administration et illicéité de la clause d'indemnisation

Public - Droit public général
14/03/2017
Si, dans le cadre d'un litige indemnitaire, l'une des parties ou le juge soulève, avant la clôture de l'instruction, un moyen tiré de l'illicéité de la clause du contrat relative aux modalités d'indemnisation du cocontractant en cas de résiliation anticipée, il appartient à ce dernier de demander au juge la condamnation de la personne publique à l'indemniser du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de la résiliation du contrat par la personne publique sur le fondement des règles générales applicables, dans le silence du contrat, à l'indemnisation du cocontractant en cas de résiliation du contrat pour un motif d'intérêt général.
Et dans l'hypothèse où le juge inviterait les parties, après la clôture de l'instruction, à présenter leurs observations, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, sur le moyen soulevé d'office et tiré de l'illicéité de la clause d'indemnisation du contrat, le cocontractant de la personne publique peut, dans ses observations en réponse soumises au contradictoire, fonder sa demande de réparation sur ces règles générales applicables aux contrats administratifs. Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 3 mars 2017 (voir sur les conditions de légalité d'une telle clause, CE, 4 mai 2011, n° 334280 et CE, 22 juin 2012, n° 348676). En l’espèce, les conditions particulières du contrat litigieux prévoyaient qu'en cas de résiliation anticipée, quelle qu'en soit la cause, le bailleur aurait droit à une indemnité égale à tous les loyers dus et à échoir jusqu'au terme de la durée initiale de location majorée de 10 %.

La cour administrative d'appel de Marseille (CAA Marseille, 6e ch., 8 juin 2015, n° 14MA04874), en jugeant qu'une telle indemnité, d'un montant supérieur au loyer que le tribunal de grande instance de Marseille aurait continué à verser en exécution du contrat si celui-ci n'avait pas été résilié, était manifestement disproportionnée au regard du préjudice résultant, pour la société X, des dépenses qu'elles avait exposées et du gain dont elle avait été privée, dès lors que la société ne justifiait pas de charges particulières ou de l'impossibilité de vendre ou de louer ce matériel, n'a ni commis d'erreur de droit, ni inexactement qualifié les faits.
 
En outre, la société X s'est exclusivement prévalue, au soutien de ses conclusions indemnitaires, de la clause de résiliation prévue par le contrat. Alors que la cour l'a informée de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'illicéité de cette clause, elle s'est bornée, dans ses observations en réponse, à contester le bien-fondé de ce moyen. En l'absence de toute demande de la société tendant à l'indemnisation des conséquences de la résiliation anticipée du contrat sur le fondement des règles générales applicables aux contrats administratifs, la cour, en ne se prononçant pas sur ce point, n'a ni méconnu son office, ni insuffisamment motivé son arrêt.
 
Par Yann Le Foll
 
 
Source : Actualités du droit