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Prescription en matière pénale : application

Pénal - Procédure pénale
14/10/2020
Dans un arrêt du 13 octobre 2020, la Cour de cassation affirme que la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 réformant la prescription en matière pénale, loi relative à la prescription publique, est applicable immédiatement à la répression des infractions commises avant son entrée en vigueur, lorsque les prescriptions ne sont pas acquises. 
En 2012, un homme commet plusieurs infractions. Le dernier acte d’investigation de l’enquête est daté du 14 novembre 2014. Le 7 août 2015, le procureur de la République fait citer cet homme devant la juridiction correctionnelle pour les faits susvisés. Le tribunal correctionnel, par jugement du 19 décembre 2015 déclare les faits établis et entre en voie de condamnation.
 
Le prévenu forme opposition à cette décision par lettre reçue le 26 décembre 2017. Le 12 février 2019, le tribunal déclare l’opposition recevable et annule la citation du 7 août 2015 et le jugement subséquent puis retient le prévenu dans les liens de la prévention et prononce des peines.
 
Intéressé et ministère public interjettent appel. Le prévenu soutient que la prescription applicable était de 3 ans selon l’article 8 du Code de procédure pénale dans sa version antérieure à la loi du 27 février 2017 et non 6 ans comme désormais. Selon lui, elle était donc acquise au plus tard le 14 novembre 2017, avant qu’il ne forme opposition.
 
Rappelons alors que la loi du 27 février 2017 (L. n° 2017-242, 27 févr. 2017, JO 28 févr., v. Réforme de la prescription pénale : la loi du 27 février 2017 passée au crible, Actualités du droit, 12 mai 2017 et v. Réforme de la prescription pénale : nouveaux délais et application de la loi dans le temps, Actualités du droit, 1er mars 2017) portant réforme de la prescription en matière pénale a doublé le délai de prescription de droit commun en matière délictuelle qui passe donc à 6 ans. Cette loi, étant une loi de forme, s’applique aux infractions commises à partir de son entrée en vigueur mais aussi aux infractions commises antérieurement dès lors que la prescription n’a pas été acquise avant l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. En effet l’article 112-2, 4° du Code pénal prévoit l’application immédiate à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur des lois relatives à la prescription de l’action publique, lorsqu’elles ne sont pas acquises.
 
La cour d’appel écarte l’argumentation du prévenu. Elle juge « la prescription n’était pas acquise au 1er mars 2017, date de l’entrée en vigueur de la loi du 27 février 2017 ». En effet, le dernier acte interruptif de prescription date du 14 novembre 2014. La loi nouvelle allongeant le délai de prescription de droit commun des délits à six ans est donc applicable aux faits en cause et ce conformément à l’article 112-2, 4° du Code pénal.
 
Ainsi, pour les juges du second degré, l’article 4 de la loi du 27 février 2017 avait pour objectif d’éviter la remise en cause de la validité des procédures en cours  et ne peut mettre en échec l’application de l’article 112-2, 4° du Code pénal. Les faits ne sont donc pas prescrits.
 
L’intéressé forme un pourvoi en cassation. En vain. Pour la Haute juridiction, « la cour d’appel n’a méconnu aucun des textes visés au moyen ».
 
La Cour de cassation affirme dans son arrêt du 13 octobre 2020 qu’au regard des travaux parlementaires, l’article 4 de la loi du 27 février 2017 a eu pour seule finalité « de prévenir la prescription de certaines infractions occultes ou dissimulées par l’effet de la loi nouvelle ». Cette dernière prévoyant notamment que le délai de prescription ne peut excéder douze années à compter du jour où l’infraction a été commise.
 
Il faut donc interpréter « restrictivement » ce texte qui ne pourrait avoir pour effet de déroger de façon générale aux dispositions de l’article 112-2, 4° du Code pénal qui prévoient que « les lois relatives à la prescription de l’action publique sont applicables immédiatement à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur, lorsque les prescriptions ne sont pas acquises ».
 
Source : Actualités du droit