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Concessions : une version « allégée » de la définition préalable des besoins

Public - Droit public des affaires
04/03/2020
Dans un arrêt du 26 février 2020, le Conseil d’État a affirmé la possibilité pour l'autorité concédante de prévoir un critère d'appréciation des offres fondé sur la comparaison des prix unitaires proposés par les candidats pour des prestations supplémentaires, même lorsque le volume exact de ces prestations n’est pas déterminé.
L’affaire concernait une procédure d’attribution de concession de mobilier urbain par une commune.
 
Une société dont l’offre avait été rejetée avait demandé au juge des référés d'annuler la procédure de passation, ou au moins d'annuler les décisions de rejet de son offre et d'attribution de la concession à la société dont l’offre avait été retenue. Le juge des référés avait fait droit à sa demande et annulé la procédure en retenant que le règlement de la consultation mentionnait la possibilité de commander des prestations supplémentaires, « mais qu'en l'absence de limite quantitative pour ces prestations, la commune avait insuffisamment défini l'étendue des besoins et s'était ainsi réservé une marge de choix discrétionnaire ne garantissant pas l'égalité de traitement des candidats et la transparence de la procédure ».
 
La commune, contestant cette décision, a décidé de porter l’affaire devant le Conseil d’État.
 
Ce dernier invalide le raisonnement du juge des référés en affirmant au contraire qu’il est « loisible à l'autorité concédante, lorsqu'elle estime qu'elle pourra être placée dans la nécessité de commander des prestations supplémentaires au cours de l'exécution du contrat, sans être en mesure d'en déterminer le volume exact, de prévoir, au stade de la mise en concurrence initiale, un critère d'appréciation des offres fondé sur la comparaison des prix unitaires proposés par les candidats pour ces prestations ».
 
Pas d’obligation de fixer une limite quantitative
 
Dans le cas d’espèce, le règlement de la consultation comportait un critère portant sur le coût d'achat de diverses prestations supplémentaires, ainsi qu'un tableau de prix de mise à disposition, s'appliquant au déploiement de mobiliers supplémentaires correspondant à des mobiliers existants précisément décrits dans le cahier des charges, que les candidats devaient remplir en indiquant un prix unitaire.
 
Contrairement au juge des référés, le Conseil d’État retient que l'absence de limite quantitative à ces prestations ne méconnaissait pas le principe de la définition préalable par l'autorité concédante de l'étendue de ses besoins et ne laissait pas non plus à la commune une marge de choix discrétionnaire, dès lors que le tableau susmentionné « permettait de comparer les prix unitaires des différentes offres, et, au surplus, que les candidats admis à concourir étaient à même de demander des précisions sur ce point à l'autorité concédante s'ils l'estimaient souhaitable ».
 
L’ordonnance est donc annulée.
 
L’offre anormalement basse non applicable aux concessions
 
Un autre point intéressant était soulevé dans cette décision. Dans ses conclusions, le rapporteur public Gilles Pélissier invitait le Conseil à se prononcer « sur l’opérance et,  dans l’affirmative, l’application, de la notion d’offre anormalement basse en matière de  concessions », sujet qui n’avait jusqu’alors pas été tranché.
 
Les juges du Palais-Royal affirment ici que « la prohibition des offres anormalement basses et le régime juridique relatif aux conditions dans lesquelles de telles offres peuvent être détectées et rejetées ne sont pas applicables, en tant que tels, aux concessions ». Un candidat à l’attribution d’un contrat de concession ne pourra ainsi pas soulever le moyen tiré du caractère anormalement bas d’une offre devant le juge administratif.
 
Pour aller plus loin
– Pour des développements détaillés sur la définition préalable des besoins, voir Le Lamy Droit public des affaires 2019, nos 1914 et suivants ;
– Lire les conclusions du rapporteur public Gilles Pélissier dans cette affaire.
Source : Actualités du droit